Interview de Leandre Ribera

par Silvia ROSSINI - il y a 5 années

C'était le 16 mai 2018 au Treizième Art Théâtre à Paris. Leandre Ribera avait accordé une interview à l'association La Grande Famille des Clowns juste après avoir joué son spectacle "Rien à dire"​​...

Silvia Rossini : « Je crois qu’il n’y a rien à dire… »

Leandre Ribera : « Il y a « Rien à dire »… c’est ça. » (rire) »

S. R. : « Comment est né ce spectacle ? »

L. R. : « Il y a trente ans… J’avais envie de faire ce que je fais toujours mais pousser moins, moins vers l’extérieur, moins « show » et puis ça c’est fait avec le public, comme toujours : « ça c’est mauvais », « ça c’est pas mal », « ah, là on rigole », « là on ne rigole pas »… »

S. R. : « Ça, on le garde… »

L. R. : « Oui, ça on le garde… et après 4 ans, j’avais le spectacle. »

S. R. : « C’est la 4e fois que je vois ton spectacle, à chaque fois je trouve des nouvelles choses, est-ce que pour toi c’est toujours le même plaisir de le jouer ? »

L. R. : « Oui, c’est toujours le même plaisir, c’est toujours un défi. C’est le métier du clown, on n’est jamais sauvegardé. Il faut sauter chaque fois (mime un curseur) c’est toujours un petit peu trop à droite… Argh ! …Un petit peu trop à gauche et puis le public n’est pas le même qu’hier… Argh ! Je l’ai perdu !!! »

S. R. : « Pour toi, le public est très important, tu joues beaucoup avec le public… »

L. R. : « C’est plus que ça, oui. Il y a le jeu concret avec le public mais il y a le rythme à chaque fois… Paris c’est froid. »

S. R. : « Paris c’est différent ? »

L. R. : « On sent que c’est plus des habitués qui vont au théâtre, il y a une partie du public qui vient en se disant : « On va au théâtre voir ce qu’ils font ce soir ! »
C’est différent dans les villes où ils ont dix spectacles par an et où tout le monde va voir le spectacle ! Ici c’est… (mime quelqu’un qui s’affale dans son fauteuil) « Voilà, donne nous ! »

S. R. : « J’avais vu ton spectacle à Avignon l’année dernière, là il y avait un public qui était très porteur et aussi au Samovar où il y avait un public de clowns… »

L. R. : « C’était dur le Samovar… »

S. R. : « Ah bon ? Je n’ai pas eu cette impression. »

L. R. : « Oui, pour moi c’était dur. »

S. R. : « Et tu nous avais appelés, Philippe Merle et moi sur scène, d’ailleurs. »

L. R. : « Ah oui ?! (rire) »

S. R. : « Moi ce qui m’étonne dans ton spectacle c’est qu’il est très lent, tu prends le temps, tout est étiré, tout est juste et en même temps il y a un rythme et ça ne descend jamais, c’est toujours tenu. Comment arriver à ça ? Je pense que ça ne s’explique pas... »

L. R. : « J’ai découvert il y a longtemps que si tu te dis au début du spectacle « ça va… tranquille ! » le public se pose plus et alors quand le public est posé, confortable, tout va plus vite… À l’envers. Ça marche à l’envers !
Par contre les jours où je suis nerveux c’est lent… c’est étonnant. »

Leandre Ribera, "Rien à dire". Crédit photo : DR
Leandre Ribera, "Rien à dire". Crédit photo : DR


S. R. : « Comment as-tu décidé de devenir clown ? »

L. R. : « Oui, j’ai vu Yves Lebreton en Espagne, j’avais 16 ans (mime avec la bouche ouverte) « Mais c’est ça que je veux faire ! Il fait ce que je veux faire ! Comment ça se fait ? »

S. R. : « Et ensuite tu t’es formé ? »

L. R. : « Non, je n’ai pas été formé. J’ai appris sur le tas surtout avec des mauvais spectacles... J’ai fait tout : les échasses, les fêtes d’anniversaire des enfants… Oui, il y a les parents derrière qui sont bourrés et les enfants méchants devant qui disent « Ah, c’est pas drôle, c’est pas drôle, c’est pas drôôôle… ! Ouais, c’est une bonne école ! (rire) »

S. R. : « Comme « Rien à dire » est un spectacle sans paroles, il tourne dans le monde entier. Il y a des différences dans le ressenti sur ce spectacle ? »

L. R. : « Il n’y a pas tant de différences dans le ressenti du public, il y a des différences dans les réseaux... selon comment la culture est prise dans les différents pays.

Je raconte toujours la même anecdote. J’ai joué pendant 10 ans en Espagne et j’étais drôle. J’étais drôle (rire) « Ah, tu es drôle ! « Ha ! Ha ! Comme tu es drôle ! ». Un jour j’ai passé les Pyrénées en faisant de l’autostop. Il y a un "truck driver" qui m’a pris. 

Il me demande : « Qu’est-ce que tu fais dans la vie ? » 

Je dis : « Je suis clown. »

Il me dit : « Ah, tu es un artiste ! »

(Il fait l’air étonné) « Comment ? Un artiste ? »

Personne ne m’avait dit que j’étais un artiste en Espagne. La culture française… Mais la réaction du public est la même, la perception change… En Angleterre tu es "entertainer" : c’est différent. Tu n’es pas un artiste, tu es "entertainer". En France on fait la culture de tout : la culture du fromage (rire)… »

Leandre Ribera, "Rien à dire". Crédit photo : DR
Leandre Ribera, "Rien à dire". Crédit photo : DR


S. R. : « Et puis quand on dit « clown », certaines personnes ont une idée du clown qui ne correspond pas à ce que tu fais. Il y a des clichés. »

L. R. : « Quand tu sors tu monde occidental il y a des codes de langage qui sont différents. Au Japon j’ai eu du mal avec la gestualité parce qu’on ne dit pas moi (geste avec l’index sur la poitrine) on dit moi (index sur le nez). Plein de petits détails comme ça. »

S. R. : « Tu as un autre spectacle en préparation ? »

L. R. : « Je vais récupérer « Démodés »… »

S. R. : « Ah oui, le trio ! Je vous avais vus… »

L. R. : « On l’avait arrêté pendant des années, je vais le reprendre.
Pas de nouveau projet, non, je suis tranquille.
Jusqu’à maintenant j’ai fait un spectacle tous les deux ans et là… ouf !
Comme celui-là tourne énormément… ma perception a changé. »

S. R. : « Je sais que tu connais le groupe de La Grande Famille des Clowns sur Facebook. L'association du même nom lance aussi un site lagrandefamilledesclowns.art avec l'intention de regrouper toutes les informations sur le clown... »

L. R. : « ...C’est génial, des gens comme ça, qui font tout ce boulot-là que je ne fais pas.
C’est une bonne idée, tout rassembler, faire la mémoire.
La mémoire se perd vite, le spectacle vivant est tellement… fiut ! (mime quelque chose qui passe vite). C’est génial, j’ai du mal avec tout ça, j’essaie d’être… J’ai ma page « Facebook », mais… »

S. R. : « Merci beaucoup… à bientôt ! »

L. R. : Mime un « au revoir »…

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